la compagnie

 

 

Depuis sa création en 2002, l’ensemble théâtral ESTRARRE a créé une vingtaine de spectacles autour de textes contemporains ou de pièces du répertoire.

Résolument engagés, ces spectacles confrontent sur le plateau les écritures, les époques, les genres autour de la question centrale de la place de l’individu dans la société.

En résidence longue à L’étoile du nord à Paris (18ème) et soutenue par la DRAC Ile de France, la Ville de Paris, ou encore par la Spedidam, la compagnie est à l’initiative de projets hors-les-murs et d’action culturelle à Paris, et entreprend depuis peu son développement sur d’autres territoires.

CECI N’EST PAS UNE PROFESSION DE FOI
mais bien une tentative de porter et de partager un regard sur notre travail. Personne ne sait de quoi demain sera fait.

 

 

 

Il me paraît improbable qu’une société, quelle qu’elle soit, puisse exister. Il me paraît incompréhensible qu’un groupe d’êtres humains réussisse à tenir enfoui sous le carcan social toutes ses rages, tous ses désirs, toutes ses pulsions. Sachant un peu ce que je ressens, ça m’étonne vraiment. C’est de cet étonnement que vient l’articulation de mon travail de plateau.

ESTHÉTIQUE DE LA CONFRONTATION
Par confrontation, j’entends confrontation sur le plateau des écritures, des époques, ou confrontation des genres (notamment féminin-masculin) mais également maniement des références et des clichés ainsi que des codes de jeu existants. Envisageant le théâtre comme un ensemble de codes à interroger et à réinventer, nous cherchons à travers ces confrontations une esthétique non conforme, non conformiste. Je reviens souvent au travail d’écriture de Heiner Müller, à l’insolence de son théâtre vis à vis de toute logique conservatrice.

MISE EN RYTHME DE L’ESPACE
Depuis sa création, la compagnie explore les possibilités d’un théâtre pauvre. Un univers de pacotilles, un théâtre fait de nos mains pour qu’il ne ressemble à aucun autre et des artifices qui se dénoncent, qui s’écroulent comme des jouets se cassant peu à peu dans les mains d’un enfant. À quoi s’est ajoutée la vidéo, notamment travaillée en direct, qui apporte crudité et réalité. Le véritable travail réside dans la mise en rythme de l’espace, il ne nécessite pas la production de décors imposants et coûteux.

ENSEMBLE ! 
Un projet artistique se doit d’être une nouvelle expérimentation du mot « ensemble ». Ensemble, doivent travailler les artistes. Ensemble, vivent acteurs et spectateurs le temps d’un spectacle. Il nous semble politiquement urgent de retrouver du sens au mot « ensemble ». Bien qu’estrarre ne soit pas un collectif, le travail de la compagnie se nourrit de fidélités très fortes dans la composition des distributions. Un groupe ayant en commun un regard sur le monde et une envie du théâtre ainsi que de nombreuses expériences. Des acteurs qui avancent ensemble dans la recherche artistique.

CORPS
Chez nous, les corps sont mis en avant : avant de mettre à jour une psychologie ou une histoire, les textes viennent d’abord révéler le corps de chaque acteur. Entraînant l’acteur dans un dispositif scénique qui le met souvent dans une sur-agitation contrôlée (influence Kantor), lui demandant un investissement physique de la partition (bio mécanique meyerholdienne), ouvrant le jeu à la déraison, à la profusion (on pense à Franck Castorf), nos spectacles donnent à voir le broyage de l’humain par la machine sociale (et nous n’aurons évidemment pas l’audace de penser à nous comparer à une des influences sus-citées).

POLITIQUE 
Notre théâtre porte en lui une forte nécessité d’interroger la façon dont nous vivons ensemble. Notre travail, composé de tentatives différentes – spectacles politiques, actions autour des spectacles, mais surtout vision du monde traversant, portant les mises en scènes des textes « classiques » comme contemporains – notre travail donc, tente de redonner au théâtre une place politique au sein de la société. Il est porté par une tentative de lucidité face au monde dans lequel nous vivons et par une colère face à l’état de celui-ci. Colère pour ne pas renoncer. Colère comme contre-pouvoir. Nos rêves, nos désirs, nos pulsions, notre sexualité, notre corps, qu’en faisons-nous en société ? Et qu’en fait la société ?

Julien Kosellek